L’art des accords mets et vins sur les charcuteries & viandes lorraines : secrets d’un terroir généreux

La charcuterie, portée par la tradition paysanne et la générosité lorraine, régale les tables depuis le Moyen Âge (source : Saveurs Lorraine). Jambon, fuseau, andouille, pâté lorrain… Chaque spécialité possède des textures et des aromatiques très différentes.

• Le jambon cru de Lorraine : Produit emblématique, il est issu d’un savoir-faire ancestral. Affiné souvent 9 à 12 mois, il offre un gras fondant et des notes de noisette remarquables.
  • Accord idéal : Un Côtes-de-Toul gris. Ce vin, spécialité locale, éclaire le jambon par sa fraîcheur et ses arômes de petits fruits rouges (framboise, groseille). Le fameux « Gris de Toul » – issu principalement du gamay – permet de trancher dans la puissance du goût sans alourdir l’ensemble. Le millésime 2022, par exemple, a été primé au Concours général agricole de Paris (source : Concours Agricole Paris).
• L’andouille du Val d’Ajol : Fumée, relevée, la star des foires régionales.
  • Accord idéal : Un Auxerrois blanc, sec, léger, vif et floral. Les arômes de fleurs blanches – typiques de l’Auxerrois lorrain – tranchent avec le gras de l’andouille et rafraîchissent le palais.
• Le pâté lorrain : La pâte feuilletée dorée, le fondant du veau et du porc marinés au vin blanc… Il appelle la convivialité.
  • Accord idéal : Le vin blanc sec de Toul, à base d’Auxerrois majoritaire, s’impose encore. Pour les amateurs de rouge, un Pinot noir léger est tout aussi intéressant, en particulier sur les versions plus musclées du pâté avec de l’ail ou de la truffe de Meurthe-et-Moselle (source : Vins de Toul).
• Le fuseau lorrain : Petit saucisson fumé typique à la coupe fine et au goût affirmé.
  • Accord idéal : Pinot noir de Lorraine jeune. L’acidité du vin fait ressortir l’épice du fuseau. Éviter les vins trop tanniques qui pourraient écraser le goût du saucisson.

À la croisée des inspirations alsacienne, bourguignonne et champenoise, la Meurthe-et-Moselle a développé une diversité culinaire où le porc, le bœuf, mais aussi la volaille et – plus rare – l’agneau, sont à l’honneur. Les fêtes de village, le repas dominical, le banquet familial : chaque occasion s’intègre dans un rituel gastronomique chaleureux, où la viande règne en majesté.

Boudin noir et vin rouge : l’harmonie inattendue

Traditionnellement dégusté lors de la Saint-Martin, le boudin noir lorrain développe un goût puissant, parfois sucré-salé (avec pomme ou oignon). Il faut donc un vin à la fois fruité et souple.

• Accord star : Un Pinot noir peu tannique, servi légèrement frais, pour jouer sur la vivacité et la douceur. Un Accord que défend le sommelier Philippe Faure-Brac (Meilleur Sommelier du Monde 1992) pour toutes les charcuteries sanguines (source : Philippe Faure-Brac).
• Variante gourmande : Un Gris de Toul, toujours, qui, grâce à sa structure, relève la pomme et le parfum du boudin.

La quiche lorraine & les blancs vifs

Impossible de parler viande sans saluer la reine des tablées lorraines : la quiche. Œufs, lard, crème, pâte brisée – une recette séculaire dont la première trace écrite remonte au XVIe siècle (source : Lorraine au Cœur). L’accord classique ? Il faut éviter toute lourdeur supplémentaire, donc adieu les rouges capiteux.

• Vin parfait : Toujours l’Auxerrois ou le Gris de Toul, pour la fraîcheur et la précision de l’accord. Certains optent même pour un Crémant de Lorraine, dont les fines bulles réveillent la crème et le lard.

Le pot-au-feu, la potée lorraine et la magie des rouges légers

Sur ces plats familiaux, cuisinés longuement, avec légumes, navets et viande (bœuf ou porc, parfois côtelette de porc fermier du Toulois), il y a là encore matière à s’inspirer de la tradition monastique.

• Accords de choix :
  • Pinot noir de Lorraine jeune, peu tannique pour accompagner la tendreté de la viande.
  • Crémant de Lorraine, pour ceux qui osent l’originalité. Les bulles apportent une dimension festive, et leur vivacité fait merveille avec les légumes et le gras du bouillon.

• Fraîcheur avant tout : Les vins de Lorraine privilégient toujours la fraîcheur fruitée et la minéralité, idéales pour balancer la richesse de la charcuterie et des viandes.
• Contrastons les puissances : Face à des mets puissants (boudin, andouille), choisir un vin plus léger, jamais trop tannique, souvent jeune.
• Attention au fumé : Les charcuteries fumées réclament un blanc vif ou un rosé non boisé pour éviter l’effet « lourd » en bouche.
• Les bulles comme alliées : Le Crémant de Lorraine est bien plus qu’un vin d’apéritif. Avec sa montée en puissance (près d’1 million de bouteilles produites en 2023 selon Vins de Lorraine), il se pose en joker sur toutes les viandes festives (jambon, volaille, pâté).

Bilan chiffré du vignoble de Lorraine (2023)

Sources : Vins de Lorraine, Comité interprofessionnel des vins de Lorraine (CIVL)

Le terroir lorrain, c’est aussi la curiosité et l’audace. Quelques suggestions qui sortent des sentiers battus, relevées lors des Foires gourmandes ou racontées par nos aînés lors de veillées d’hiver :

• Magret de canard fumé du Saulnois + Moselle AOC Pinot gris : l’ampleur légèrement miellée du Pinot gris adoucit le fumé du magret (source : Association des Vignerons de Moselle).
• Pâté lorrain truffé + Crémant de Lorraine rosé : Les bulles et la délicatesse du rosé permettent à la truffe de s’exprimer sans être écrasée.
• Terrine de lapin aux herbes + Gris de Toul millésime récent : parfait équilibre sur les notes sauvages de la viande.

Aujourd’hui, la Lorraine met un point d’honneur à faire connaître ses produits et leurs accords. Selon la Chambre d’Agriculture de Meurthe-et-Moselle, 62% des foyers consomment régulièrement des vins locaux en accompagnement des charcuteries et viandes du cru. Les tables étoilées lorraines participent à cette dynamique, à l’image de la maison Lameloise à Nancy, qui accorde une place de choix aux vins de Toul sur toutes ses sélections carnéed (Chambre d'Agriculture 54).

Les foires gourmandes, ouvertes à tous, permettent chaque automne de tester ces accords, d'échanger avec des vignerons capables de conter chaque climat, chaque millésime, chaque parcelle. Selon l’Office de Tourisme de Toul, plus de 10 000 visiteurs viennent chaque année découvrir ces instants de partage (Source : Ville de Toul).

Lorsque l’on pénètre dans le monde des charcuteries et viandes lorraines, c’est tout un univers de convivialité, de générosité et de subtilité qui s’ouvre à nous. Les accords mets et vins présentés ici n’ont rien d’intangible : l’expérimentation et la curiosité restent de mise. Le terroir lorrain change, innove, accueille de nouvelles générations de producteurs passionnés. À votre tour d’oser des duos inattendus – et de profiter, autour d’une table réunie, de ce que la Lorraine a de meilleur à offrir… dans le verre comme dans l’assiette.